CONCLUSIONS GÉNÉRALES
En mars 2023, les banques alimentaires du Canada ont enregistré plus de 1,9 million de visites, soit un taux d’utilisation dépassant largement celui de l’an dernier, qui représentait déjà un record.
Le nombre de visites aux banques alimentaires en mars 2023 a atteint un niveau sans précédent. Ce niveau a largement dépassé le nombre record de l’an dernier, malgré un taux de chômage demeurant à un niveau faible et stable durant cette même période. Ce taux d’utilisation record est cohérent avec les conclusions d’autres études mentionnées dans le présent rapport qui montrent qu’un nombre croissant de Canadiens ont de la difficulté à payer leurs dépenses de base et que les niveaux d’insécurité alimentaire augmentent de façon spectaculaire.
Le recours aux banques alimentaires cette année a augmenté de 32 % par rapport à mars 2022, et de 78,5 % par rapport à mars 2019.
Le nombre total de visites aux banques alimentaires n’a cessé d’augmenter depuis 2019, représentant cette année la plus forte augmentation d’une année à l’autre jamais signalée. Cette augmentation a coïncidé avec les taux d’inflation générale les plus élevés en 40 ans, et la montée en flèche du coût des produits essentiels comme la nourriture, le logement et le transport, qui a atteint des niveaux encore plus élevés. Alors que le pouvoir d’achat des ménages continue de baisser, un plus grand nombre d’entre eux, y compris ceux dans les tranches de revenu supérieur, sont en situation d’insécurité alimentaire.
Selon les répondants au sondage, les trois principales raisons pour lesquelles les gens ont eu recours aux banques alimentaires cette année sont le coût de la nourriture, le coût du logement et les faibles salaires ou les heures travaillées insuffisantes.
Les personnes qui ont recours aux banques alimentaires au Canada sont plus susceptibles d’être dans la tranche de revenu la plus faible et sont donc particulièrement touchées par toute augmentation du prix des aliments. Si l’on tient compte de tous les facteurs, la hausse du coût des aliments n’est que la partie émergée de l’iceberg de l’abordabilité en ce qui concerne les défis auxquels font face les ménages ayant les plus faibles revenus. En raison de leurs ressources financières limitées et des coûts du logement qui dépassent largement le seuil d’abordabilité de 30 % du revenu, les personnes à faible revenu sont moins susceptibles de gérer l’inflation alimentaire et plus susceptibles de vivre dans l’insécurité alimentaire. De plus, les personnes occupant les emplois les moins bien rémunérés étaient moins susceptibles d’avoir connu une augmentation de leur salaire au cours de l’année et étaient plus susceptibles de travailler dans des secteurs où le travail à temps partiel est la norme.
Les enfants représentent le tiers des usagers des banques alimentaires.
Le pourcentage d’enfants de moins de 18 ans qui ont recours aux banques alimentaires est demeuré stable depuis la période avant la pandémie. Les enfants représentent actuellement 33 % des usagers des banques alimentaires. Ils ne représentent que 20 % de la population générale, ils sont donc encore largement surreprésentés parmi la clientèle des banques alimentaires. Depuis le début de la pandémie, les ménages avec enfants sont plus susceptibles d’être touchés par l’insécurité alimentaire, et le nombre de ménages biparentaux avec enfants de moins de 18 ans qui ont recours aux banques alimentaires a augmenté, passant de 18,8 % en 2019 à 21 % en 2023. Les membres du réseau de banques alimentaires ont mentionné que, les familles avec enfants sont aux prises avec des coûts élevés du logement, de la nourriture et du carburant, en plus des frais de garde d’enfants et d’autres besoins propres aux enfants. Parmi les personnes en difficulté figurent de nombreux nouveaux arrivants qui occupent un emploi précaire ou dans le cadre duquel on ne leur confie pas suffisamment d’heures pour qu’ils puissent joindre les deux bouts.
L’aide sociale provinciale constitue la principale source de revenu pour les clients des banques alimentaires.
La principale source de revenu de 42,4 % des clients des banques alimentaires est l’aide sociale provinciale, qui comprend les deux catégories suivantes : l’assistance générale et les prestations d’invalidité provinciales. Les taux provinciaux d’aide sociale sont si bas que tous les types de ménages qui reçoivent de l’aide sociale vivent sous le seuil de pauvreté officiel dans presque toutes les provinces et tous les territoires. Dans de nombreux cas, la valeur réelle en dollars de ces taux a à peine augmenté par rapport à il y a 30 ans; et dans certains cas, elle a même diminué.
Outre ces faibles taux, les critères d’admissibilité pour bénéficier de l’aide sociale provinciale dans la plupart des provinces et des territoires sont très stricts, y compris des mesures de récupération à raison d’un dollar pour un dollar pour les demandeurs ayant un revenu d’emploi et des plafonds de liquidités très bas pour être admissibles à l’aide. Ces règles ont eu des répercussions importantes après la pandémie. Selon les membres du réseau de banques alimentaires, les clients qui bénéficiaient de l’aide sociale provinciale et qui étaient admissibles à la PCRE ont été soumis à des mesures de récupération et à l’impôt fédéral, en plus de voir d’autres avantages fiscaux (comme les prestations pour enfants et les crédits pour TPS) réduits en raison de l’augmentation temporaire de leur revenu au cours de l’année précédente.
Les personnes qui reçoivent des prestations d’invalidité provinciales représentent 13,6 % du total des ménages qui ont recours aux banques alimentaires.
Bien que la proportion de clients qui reçoivent des prestations d’invalidité provinciales comme principale source de revenu ait diminué par rapport à avant la pandémie, cette baisse n’est pas attribuable à une diminution des besoins chez les personnes handicapées, mais plutôt à une augmentation des proportions de ménages ayant d’autres principales sources de revenu. Les personnes handicapées éprouvent des difficultés disproportionnées parce qu’elles ont des besoins importants en matière de soins de santé et que ces coûts s’ajoutent aux effets d’une inflation rapide. En 2023, 28 % des personnes ayant une incapacité physique et 39 % ayant une incapacité mentale ont déclaré avoir souffert de la faim au cours des 12 mois précédents par manque d’argent pour se nourrir, comparativement à 10 % des personnes sans incapacité.
Pour 17 % des clients des banques alimentaires, l’emploi constitue leur principale source de revenu, comparativement à 12 % en 2019.
Après plus de dix ans avec des taux oscillant entre 11 % et un peu plus de 12 %, le pourcentage de clients des banques alimentaires pour qui l’emploi constitue la principale source de revenu a augmenté considérablement depuis 2021. Ce groupe représente maintenant près de 17 % des clients des banques alimentaires, soit la proportion la plus élevée à ce jour. Cette augmentation coïncide avec la hausse importante du nombre de groupes racisés ayant recours aux banques alimentaires au cours de la dernière année, passant de 32,5 % en 2022 à 39,3 % en 2023. Les personnes appartenant aux groupes racisés sont plus susceptibles d’être des travailleurs pauvres que celles des groupes non racisés et, selon Statistique Canada, elles étaient plus susceptibles de gagner un salaire horaire inférieur à la moyenne et de travailler à temps partiel en 2022. Les membres des groupes racisés qui occupaient un emploi pendant la pandémie étaient également plus susceptibles que ceux des groupes non racisés d’avoir eu besoin des services d’une banque alimentaire ou d’un programme semblable pendant cette période.
Le pourcentage d’Autochtones qui ont recours aux banques alimentaires est de 12 %, alors qu’ils ne représentent que 5 % de la population générale.
Le pourcentage d’Autochtones qui ont recours à une banque alimentaire est de 12 % en 2023, alors qu’ils ne représentent que 5 % de la population générale. Comme les taux de pauvreté fondée sur le revenu des Autochtones sont près de deux fois plus élevés que ceux de la population non autochtone, les Premières Nations, les Métis et les Inuits subissent les effets combinés d’un faible revenu et des difficultés pour gérer les taux d’inflation de manière à subvenir à leurs besoins de base, au-delà de ce que connaît la population non autochtone. Les changements climatiques ont également eu une incidence sur l’accès aux aliments commerciaux et traditionnels dans les communautés autochtones. En 2023, près de la moitié (48 %) des Autochtones ont déclaré avoir souffert de la faim au cours des 12 derniers mois en raison d’un manque d’argent pour se nourrir, comparativement à 15 % de la population blanche.
26,6 % des clients des banques alimentaires sont des nouveaux arrivants au Canada qui sont au pays depuis 10 ans ou moins.
La proportion de nouveaux arrivants au Canada qui ont recours aux banques alimentaires a considérablement augmenté par rapport à l’an dernier, où ils représentaient 17,2 % des clients des banques alimentaires, et a plus que doublé par rapport à 2016, où ils représentaient 12,5 % des clients. Les nouveaux arrivants sont plus d’être des travailleurs pauvres que les autres personnes. Ils sont plus susceptibles d’avoir des emplois instables, des heures de travail imprévisibles et moins d’avantages sociaux comme l’assurance-médicaments et les soins dentaires. Les nouveaux arrivants sont également plus susceptibles d’être locataires, ce qui signifie qu’ils paient probablement des loyers médians plus élevés auxquels ils allouent plus de 30 % de leurs revenus. Tous ces facteurs réunis les rendent particulièrement vulnérables aux répercussions de l’inflation rapide. De plus, les nouveaux arrivants venant de pays en guerre doivent affronter des difficultés extrêmes pour trouver un logement abordable et obtenir des aides gouvernementales qui varient en fonction de leur statut d’immigration.