Six groupes laissés pour compte par le filet de sécurité sociale brisé au Canada

Banques alimentaires Canada mène le sondage annuel Bilan-Faim pour fournir un aperçu ponctuel du recours aux banques alimentaires à l’échelle nationale et des personnes qui éprouvent le plus de difficultés. Il s’agit de la seule étude à regrouper plus de 4 750 banques alimentaires et organismes communautaires du pays, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du réseau de Banques alimentaires Canada.

Cette année, le rapport Bilan-Faim 2023 fait état de l’incidence dévastatrice de l’inflation galopante et du soutien social inadéquat sur la pauvreté, l’insécurité alimentaire et la faim au Canada.

Ce rapport historique a révélé que le recours aux banques alimentaires a atteint en 2023 les plus hauts niveaux de l’histoire canadienne, avec près de deux millions de visites en un mois seulement.

Il est plus que temps de reconstruire notre filet de sécurité sociale désuet et brisé. Instaurons le seuil de revenu minimum dès aujourd’hui.

« Tous les ordres de gouvernement doivent réagir, affirme Kirstin Beardsley, chef de la direction de Banques alimentaires Canada. En mettant l’accent sur les problèmes urgents en matière d’abordabilité et en réparant notre filet de sécurité sociale, il est possible d’envisager un avenir meilleur – un Canada où personne ne souffre de la faim. »

Les Canadiens ont vu les soutiens sociaux fournis par le gouvernement se dégrader sous leurs yeux au cours des dernières décennies. Le seuil de revenu actuel comporte des trous massifs et des fondations inadéquates.

Il est temps que les autorités réagissent adéquatement face à la gravité de la crise du logement et prennent des mesures audacieuses pour participer à la mise en place de nouvelles mesures de soutien, en particulier pour les personnes appartenant à des groupes particulièrement exposés au risque de devoir recourir à une banque alimentaire :

1. Adultes vivant seuls

Les adultes vivant seuls et sans enfants demeurent les types de ménages au Canada ayant le plus souvent recours aux banques alimentaires.

Les adultes vivant seuls en âge de travailler sont un groupe de personnes qui soulève les préoccupations de Banques alimentaires Canada depuis de nombreuses années. Représentant actuellement 44 % des utilisateurs des banques alimentaires, il s’agit de l’un des plus grands sous-ensembles de personnes ayant recours aux banques alimentaires en raison d’un manque de soutien gouvernemental pour les personnes qui n’ont pas d’enfants ou qui ont moins de 65 ans. En 2021, plus d’un cinquième (22 %) des adultes vivant seuls étaient sous le seuil de pauvreté officiel, comparativement à 4,4 % des personnes vivant en famille. Avec moins d’options de soutien du revenu en dehors de l’aide sociale provinciale, les adultes vivant seuls en âge de travailler qui traversent une période difficile n’ont souvent pas d’autre choix que de faire appel aux banques alimentaires en raison des très faibles niveaux d’aide sociale.

2. Personnes bénéficiaires de l’aide sociale

L’aide sociale provinciale constitue la principale source de revenu pour les clients des banques alimentaires.

La principale source de revenu de 42,4 % des clients des banques alimentaires est l’aide sociale provinciale, qui comprend les deux catégories suivantes : l’assistance générale et les prestations d’invalidité provinciales. Les taux provinciaux d’aide sociale sont si bas que tous les types de ménages qui reçoivent de l’aide sociale vivent sous le seuil de pauvreté officiel dans presque toutes les provinces et tous les territoires. Dans de nombreux cas, la valeur réelle en dollars de ces taux a à peine augmenté par rapport à il y a 30 ans; et dans certains cas, elle a même diminué. Outre ces faibles taux, les critères d’admissibilité pour bénéficier de l’aide sociale provinciale dans la plupart des provinces et des territoires sont très stricts, y compris des mesures de récupération à raison d’un dollar pour un dollar pour les demandeurs ayant un revenu d’emploi et des plafonds de liquidités très bas pour être admissibles à l’aide.

3. Personnes en situation de handicap

Les personnes qui reçoivent des prestations d’invalidité provinciales représentent 13,6 % du total des ménages qui ont recours aux banques alimentaires.

Bien que la proportion de clients qui reçoivent des prestations d’invalidité provinciales comme principale source de revenu ait diminué par rapport à avant la pandémie, cette baisse n’est pas attribuable à une diminution des besoins chez les personnes handicapées, mais plutôt à une augmentation des proportions de ménages ayant d’autres principales sources de revenu. Les personnes handicapées éprouvent des difficultés disproportionnées parce qu’elles ont des besoins importants en matière de soins de santé et que ces coûts s’ajoutent aux effets d’une inflation rapide. En 2023, 28 % des personnes ayant une incapacité physique et 39 % ayant une incapacité mentale ont déclaré avoir souffert de la faim au cours des 12 mois précédents par manque d’argent pour se nourrir, comparativement à 10 % des personnes sans incapacité.

4. Personnes autochtones

Le pourcentage d’Autochtones qui ont recours aux banques alimentaires est de 12 %, alors qu’ils ne représentent que 5 % de la population générale.

Le pourcentage d’Autochtones qui ont recours à une banque alimentaire est de 12 % en 2023, alors qu’ils ne représentent que 5 % de la population générale. Comme les taux de pauvreté fondée sur le revenu des Autochtones sont près de deux fois plus élevés que ceux de la population non autochtone, les Premières Nations, les Métis et les Inuits subissent les effets combinés d’un faible revenu et des difficultés pour gérer les taux d’inflation de manière à subvenir à leurs besoins de base, au-delà de ce que connaît la population non autochtone. Les changements climatiques ont également eu une incidence sur l’accès aux aliments commerciaux et traditionnels dans les communautés autochtones. En 2023, près de la moitié (48 %) des Autochtones ont déclaré avoir souffert de la faim au cours des 12 derniers mois en raison d’un manque d’argent pour se nourrir, comparativement à 15 % de la population blanche.

5. Travailleurs à faible revenu

Pour 17 % des clients des banques alimentaires, l’emploi constitue leur principale source de revenu, comparativement à 12 % en 2019.

Après plus de dix ans avec des taux oscillant entre 11 % et un peu plus de 12 %, le pourcentage de clients des banques alimentaires pour qui l’emploi constitue la principale source de revenu a augmenté considérablement depuis 2021. Ce groupe représente maintenant près de 17 % des clients des banques alimentaires, soit la proportion la plus élevée à ce jour. Cette augmentation coïncide avec la hausse importante du nombre de groupes racisés ayant recours aux banques alimentaires au cours de la dernière année, passant de 32,5 % en 2022 à 39,3 % en 2023.

6. Nouveaux arrivants

26,6 % des clients des banques alimentaires sont des nouveaux arrivants au Canada qui sont au pays depuis 10 ans ou moins.

La proportion de nouveaux arrivants au Canada qui ont recours aux banques alimentaires a considérablement augmenté par rapport à l’an dernier, où ils représentaient 17,2 % des clients des banques alimentaires, et a plus que doublé par rapport à 2016, où ils représentaient 12,5 % des clients. Ces derniers sont par ailleurs plus susceptibles d’avoir des emplois instables, des heures de travail imprévisibles et moins d’avantages sociaux comme l’assurance-médicaments et l’assurance dentaire. La probabilité qu’ils soient locataires est également plus grande, ce qui signifie qu’ils paient probablement des loyers médians plus élevés auxquels ils allouent plus de 30 % de leurs revenus. Tous ces facteurs réunis les rendent particulièrement vulnérables aux répercussions de l’inflation rapide. De plus, les nouveaux arrivants venant de pays en guerre doivent affronter des difficultés extrêmes pour trouver un logement abordable et obtenir des aides gouvernementales qui varient en fonction de leur statut d’immigration.

Bien que les banques alimentaires continuent de travailler fort pour combler les lacunes créées par des politiques publiques déficientes qui ne répondent pas aux besoins des Canadiens, elles ne constituent pas une solution permanente à l’insécurité alimentaire ou à la pauvreté.

Ce n’est que grâce à des politiques publiques fortes que nous pourrons réaliser notre vision d’un Canada où personne ne souffre de la faim

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